LES PARENTS
Accessoires :
Deux journaux, deux chaises (ou fauteuils). Personnages :
Michèle Laroque (noté ML) et Pierre Palmade (noté PP). Situation de départ : Les deux personnages sont sur scène assis dans leur fauteuil, et ils lisent chacun un journal. PP :
Oh dis donc ! Ah dis donc c’est formidable ça ! ML :
Quoi ? PP :
Écoute : croisière en Égypte, vous remontez le Nil pendant 10 jours,
soirées animées par Aimable et son orchestre, forfait Paris-paris pour
2 personnes du 10 au 20 avril, 11 500 francs, t’entend chérie ? ML :
Ouais ! 11 500 francs c’est pas très cher. PP :
Paraît qu’c’est magnifique la r’monter du Nil, hein. ML :
J’imagine. PP :
Ça, ça f’rait vraiment de belles vacances… ML :
Humm. PP :
… pour ma mère. ML
: Ah oui. PP :
Hein, qu’c’t’en dit, une croisière pour ma mère ? ML :
Très bien. En plus elle sait nager ta mère. PP :
Bah elle va pas très fort en c’moment, ça lui f’rait du bien. ML :
Oui et puis ça la changerait d’la montagne, parce que tu l’envoie bien
en février à la montagne, non ? Avec Mme Vercors. PP :
Ah bah tiens, elle pourrait aussi y aller avec Mme Vercors, en Egypte.
Elles s’entendent tellement bien toutes les deux. ML :
Mais enfin remarque si y’a qu’ça nous aussi on s’entend bien hein. PP :
Tu sais bien qu’avec le magasin, nous, on peut pas partir en Egypte… ML :
Oui. PP :
… en avril. ML :
Et oui. En plus juillet-août c’est les collections, septembre-octobre
c’est la rentrée, bon les fêtes j’en parle même pas hein, janvier-février
les soldes, mars la collection d’printemps… bah y reste avril… PP :
Mais tu sais bien qu’avec le magasin nous on peut pas… ML :
Je sais oui. PP :
Oui j’viens d’te l’dire. ML :
Mais tu vois c’est marrant hein, y a des femmes qui rêvent d’être astronaute,
ou Marie Curie, ou Claudia Schiffer, et moi ben rêve d’être euh… Mme Vercors.
Comme ça j’partirais 6 mois
/ 12 ! Avec ta mère d’accord, mais en vacances quand même, tu vois. PP :
Qu’c’qui a avec ma mère ? Tu m’reproches de m’occuper d’elle c’est
ça ? J’te rappelle qu’elle
sort de dépression, et elle est fragile en c’moment. ML :
Ah oui alors ses sortis de dépressions ça la fragilise d’ailleurs tellement
qu’elle a tendance a déprimé après. On voit pas trop comment elle va pouvoir
s’en sortir. Elle a un planning assez bien organisé elle s’débrouille
très très bien parce que ça tombe jamais en même temps ! Comme ça
elle a bien l’temps de déprimer et ensuite elle a bien l’temps
de… bronzer. C’est d’ailleurs la déprimé la plus bronzé qu’je connaisse. (ils
‘‘rient’’ tous les deux ) PP :
Mais tout l’monde n’a pas la chance d’avoir des parents aussi équilibrés
qu’les tiens. ML :
Oh p’t’être qu’ils prennent un p’tit peu plus sur eux et qu’ils comptent
un p’tit peu moins sur les autres. PP :
C’est p’t’être un p’tit peu plus facile d’avoir le morale à deux dans
300m² Avenue Foch que toute seule dans un 2 pièces à Clichy. Mais je peux
m’tromper… ML :
Chuis vraiment désolé que mes parents ne nous posent pas d’problème d’argent. PP :
Tant mieux pour eux si ils ne savent pas c’que c’est d’avoir a remonter
la pente. ML :
Ils seront pas non plus c’que c’est que de remonter le Nil. PP :
Ah d’accord. Alors
tes parents en avril ils sont dans leur villa, en Camargue. T’sais avec
leurs chevaux, leurs maîtres d’hôtel. Alors si ils préfèrent s’enfermés
pendant 10 jours dans une cabine de 10m² et s’envoyer tous les soirs Aimable
et son orchestre, on peut p’t’être leurs proposer l’échange avec ma mère.
En plus je crois qu’mes parents ils l’adorent ma mère. ML :
Bon alors, je vois très bien où tu veux aller mais moi pas ce soir chuis
pas en jambe. Chuis en train d’lire une étude comparative sur les crèmes
épilatoires et j’aimerais bien la finir. PP :
En effet, c’est important. ML :
Oui. PP :
Et puis pt’t’être que quand tu s’ras épilée tu s’ras plus aimable. Et
son orchestre bien sur. ML :
T’arrête ? PP :
J’arrête. (ils
font un petit rire en souriant) PP :
T’aime pas ma mère. ML :
J’ai jamais dit ça. PP :
Pas besoin de l’dire pour qu’ça s’sente. ML :
Non, mais ch’rai curieuse de savoir c’qui t’fait dire ça. PP :
Rien rien rien. J’voulais juste que tu saches que j’avais r’marquer. ML :
Alors, je sais pas c’que tu as r’marquer mais j’devais pas être là c’jour-là
hein. Si j’aimais pas ta mère j’vois pas comment j’ferai pour la supporter
aussi souvent. PP :
Ah bah voilà, on y est. Donc tu supportes ma mère. ML :
Très bien, alors, cite-moi une fois où j’ai été désagréable avec elle. PP :
OK. La canne, que tu lui as offerte pour son anniversaire, alors qu’elle
n’a jamais eu d’problème pour marcher. Tu trouves pas ça un peu déplacer ? ML :
Très bien, alors, c’est pas une canne pour marcher hein, c’est une sculpture
sur bois, et j’voyais très bien ça dans son entrée. Si y a quelques chose
de déplacer c’est le prix qu’elle m’a coûter, sa canne. J’te signale au
passage que pour mon anniversaire elle m’a offert une perruque. A c’moment
là chais pas trop comment j’dois l’prendre. PP :
(il ouvre la bouche
comme pour dire qq. chose, puis, ne sachant quoi répondre, il la referme
en regardant son magazine. Il attend un peu avant de dire la phrase qui
suit.) C’est un cadeau à la
hauteur de ses moyens. Très jolie perruque en plus. ML :
Très, tu préfères que j’l’accroche dans l’entrée ou au rétroviseur de
la voiture ? PP :
Toute façon rien de c’que fais ma mère n’est bien. Elle t’aurais offert
une rivière de diamant ça t’aurait pas plu non plus. ML :
Faux, bizarrement j’aurais préféré. PP :
A propos, qu’est-ce qu’elle est devenu cette perruque ? ML :
J’l’ai mise au coffre, j’la sort que pour les grandes occasions.
PP :
T’arrête ? ML :
……… J’arrête. (ils
font un petit rire en souriant) PP :
Moi, j’aime beaucoup ta mère. ML :
Normal j’ai des parents formidables. PP :
Non, j’parlais d’ta mère. ML :
Bon. Alors ce s’rait quoi le problème avec mon père ? PP :
Mon redressement fiscale, c’est lui quand même. Faut être un peu tordu
pour venir contrôler son gendre. ML :
Pff, mais qu’est-c’que tu racontes à c’moment là on s’connaissait même
pas, c’est justement grâce à c’contrôle qu’on s’est rencontrés. PP :
Ouais ouais ouais ouais ouais ouais. Chère la rencontre hein ! ML :
Ah non écoute n’exagère pas à c’t’époque là il pouvait savoir qu’il était
mon père, enfin qu’t’allais être ma femme, enfin qu’on allait s’marier
quoi tu m’as comprise. PP :
Ouais, enfin tu m’ôteras pas d’l’idée que ton père est tordu. Cadeau d’mariage
une agrafeuse ! ML :
C’était d’l’humour. PP :
Ben j’ai tellement rigoler qu’j’en ai encore mal au ventre dis donc. ML :
Bon ben, vous n’avez pas l’même humour. PP :
J’adore ta mère mais tu m’excuseras ton père-est-tordu. ML :
Je t’interdis de dire que mon père est tordu, t’arrête avec mon père.
Tu touches pas un cheveu de mon père, je peux te tuer si j’veux. Si tu
reparles de mon père moi je prend la perruque et je l’agrafe sur la tête
à ta mère ! Merde, j’en ai marre de ta mère, j’en peux plus d’Mme
Vercors, elle part à la mer à la neige à la montagne je m’en fous mais
qu’elle dégage ! Je peux plus la voir, elle me sort pas les trous
d’nez ! Ca fait 4 ans qu’on en parle matin midi et soir, alors elle
remonte le Nil, elle le descend, elle fait ce qu’elle veut, mais qu’elle
me pompe plus l’air sinon j’lui fait bouffer sa canne !...........
T’as compris ? ML : J’crois qu’on devrait éviter de parler d’nos parents j’ai l’impression qu’ça nous énerve. |